Comprendre le défi de la publicité responsable

Les acteurs de la filière publicité (annonceurs, agences, régies publicitaires, médias, régulateurs…) disposent de différents leviers dont les principaux sont présentés dans cette rubrique. S’ils sont actionnés avec sincérité, ils pourraient rendre la publicité plus responsable et lui donner les moyens de peser en faveur de la transition écologique.

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Les leviers de la publicité responsable

La filière publicitaire subit depuis 2020 de nombreuses pressions exercées par divers corps sociaux : études et rapports d’ONG, tribunes dans la presse, critiques virulentes sur les réseaux sociaux….

Nous sommes face à un vrai débat sur la place et le rôle de la publicité dans notre société. Le défi est gigantesque : se transformer en profondeur pour éviter un rejet massif et une sévère régulation des messages et des modalités publicitaires. 

Le secteur de la communication et de la publicité est souvent associé au modèle économique dominant, synonyme d’épuisement des ressources, de gaspillage et d’inégalités. Découvrez le témoignage de Gildas Bonnel, Président de Sidièse, Président de la Commission RSE de l’Association des agences-conseils en communication (AACC), Administrateur de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). 

La réduction de la pression publicitaire

Une publicité plus responsable commence par une réduction de la pression publicitaire exercée quotidiennement sur les citoyens, dans toutes les facettes de leur vie quotidienne.

Pourtant, les injonctions contradictoires font rage : les Français sont invités à réduire leur empreinte écologique mais, en même temps, ils sont bombardés de messages publicitaires qui les poussent à consommer davantage et qui promeuvent l’imaginaire du bonheur à travers la possession de biens. 

En réduisant la publicité, on agit sur l’un des leviers majeurs d’évolution des comportements des consommateurs, et on reconnaît ainsi le rôle de la publicité sur nos imaginaires !

La réduction de l’affichage publicitaire dans certaines villes

Plusieurs collectivités ont pris des dispositions pour réduire l’affichage extérieur. Grenoble a ainsi été la première ville européenne à supprimer l’affichage publicitaire en 2014. D’autre part, la loi Climat et résilience du 22 août 2021 prévoit dans son article 17 la décentralisation de la police de la publicité à compter du 1ᵉʳ janvier 2024. Les maires pourront ainsi assurer la police de la publicité sur leur territoire.

Le passage du « Stop Pub » au « Oui Pub »

Selon une enquête ADEME, en 2020, plus de 670 500 tonnes d’imprimés publicitaires non adressés ont été distribués, dont une part significative a été jetée sans avoir été lue. C’est pourquoi, l’article 21 de la loi Climat et résilience lance l’expérimentation du dispositif « Oui Pub » visant à restreindre pour une durée de trois ans la distribution d'imprimés publicitaires non adressés aux seuls ménages ayant explicitement indiqué de manière visible sur la boîte aux lettres leur volonté de les recevoir.

Quatorze collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales prendront part à cette expérimentation entre 2022 et 2025.

L'encadrement des messages publicitaires

La recommandation Développement Durable de l'ARPP

En tant que publicitaire, vous pouvez déjà vous référer à la recommandation Développement Durable de l’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) . Elle fixe des règles déontologiques qui s’appliquent aux annonceurs et aux agences lorsqu’ils utilisent un argument écologique ou font référence aux enjeux de transition écologique.

Une réglementation renforcée en France : la loi AGEC et la loi Climat et Résilience

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) et la loi Climat et résilience comportent quant à elles des dispositions qui encadrent, voire interdisent certaines allégations environnementales.

En savoir plus sur la loi AGEC

En savoir plus sur la loi Climat et résilience

Les choses bougent aussi au niveau européen

Depuis le début des années 2000, l’Union Européenne met en place des mesures de lutte contre le greenwashing. En effet, la Commission Européenne souhaite renforcer «la protection des consommateurs contre les allégations environnementales peu fiables ou fausses, en interdisant l’écoblanchiment et les pratiques qui induisent les consommateurs en erreur quant à la durabilité d’un produit». La directive qui structure cette action date de 2005 (Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005).

Plus tard, la directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs a procédé à une harmonisation complète de plusieurs règles concernant l’information précontractuelle (notamment les garanties), le droit de rétractation en cas de vente à distance et de vente «hors établissement», la livraison et le transfert du risque. Les allégations environnementales sont précisées dans la Directive (UE) n° 2018/851 du 30/05/18 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets) : on y trouve des définitions de termes tels que «recyclable» et «non écotoxique», «éco-conçu», etc. C’est sur cette base que se fondent les définitions officielles utilisées en France en communication. Ainsi, on retrouve ces définitions dans d’autres textes : les normes ISO 14020 et suivants, dont la 14021 ; certaines lois françaises ; les avis du CNC et les recommandations de l’ARPP .

Ces deux directives structurantes (2005/29/CE et 2011/83/UE) doivent être amendées par une proposition de directive soumise le 30 mars 2022, dans le cadre du «Paquet économie circulaire». Ce projet de directive est intitulé «Donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et à de meilleures informations». L’objectif est de renforcer « la protection des consommateurs contre les allégations environnementales peu fiables ou fausses, en interdisant l’éco-blanchiment et les pratiques qui induisent les consommateurs en erreur quant à la durabilité d’un produit. Il a été adopté en première lecture le 11 mai 2023 par le Parlement européen.

En complément, une nouvelle proposition de directive du 22 mars 2023, dite Green Claims, est en cours de discussion dans l’objectif de s’attaquer aux allégations environnementales non vérifiées mais aussi de lutter contre la prolifération des labels environnementaux. Il s’agit d’une directive qui prévoit des règles plus spécifiques que le projet de 2022. Les entreprises devront justifier leurs allégations environnementales explicites par des arguments scientifiques reconnus et que les impacts significatifs pour l’environnement soient identifiés. Elles devront préciser «si l’allégation est exacte pour l’ensemble du produit ou seulement pour certaines parties de celui-ci».

Consulter les propositions de 2022

Consulter les propositions de 2023

Les recommandations de l'ADEME sur l'utilisation de l'argument de "neutralité carbone" dans les communications des organisations

« Territoire neutre en carbone », « marque certifiée neutre en carbone », « gamme climatiquement neutre », « service zéro carbone », « neutralité carbone à vie », « produit zéro carbone », « événement neutre en CO2 »… les arguments de neutralité se multiplient dans les communications des organisations. Dans un avis d’experts publié début 2022, l’ADEME rappelle que ces arguments peuvent tromper le public, freiner des changements de comportements et provoquer des effets rebond négatifs. Ils empêchent aussi de mettre en avant les acteurs qui font preuve de sincérité et s’investissent réellement pour le climat. Enfin, leur utilisation expose les organisations à des risques de controverse et, à partir du 1er janvier 2023, à des risques juridiques (cf. article 12 loi Climat et résilience et article L.121-2 à L 121-5 du Code de la consommation). Par conséquent, l’ADEME recommande à tous les acteurs, du secteur privé comme du secteur public et non marchand, de s’engager dans une démarche de communication responsable : se défaire de l’approche purement arithmétique de la neutralité et ne pas focaliser sa communication sur la prétendue neutralité de son territoire, activité, produit ou service ; communiquer de façon transparente, proportionnée et distincte sur les différents leviers de contribution à la neutralité carbone collective, en particulier la réduction massive de son empreinte carbone et le financement de projets de compensation.

Consulter l'avis d'experts de l'ADEME

Les contrats climat

Les contrats climat sont un dispositif prévu par la loi Climat et Résilience du 22 août 2021

Ils visent à réduire le volume de communications commerciales relatives à des produits ou des services ayant un impact négatif sur l’environnement, mais aussi à favoriser la transparence de la publicité et l’engagement des annonceurs, médias, plateformes, agences et régies pour la transition écologique. 

Les contrats climat s’articulent autour de 5 axes thématiques et sont le fruit d’une réflexion menée avec l’ensemble des parties prenantes du secteur de la publicité : ce que nous mesurons, ce que nous produisons, ce que nous promouvons, ce que nous contrôlons, ce à quoi nous sensibilisons.

Un bilan sur l’efficacité des contrats climat sera remis par le Gouvernement au Parlement fin 2023 (article 14 de la loi Climat & Résilience).

Chaque contrat climat doit être déposé sur la plateforme : www.publicite-responsable.ecologie.gouv.fr

L’obligation de déclaration sur la plateforme s’applique aux importateurs, aux distributeurs ou autres metteurs sur le marché des biens et services répondant aux deux critères suivants :

  • les biens et services sont soumis à un affichage environnemental obligatoire ou à une étiquette énergie obligatoire ou à une étiquette CO2 obligatoire ; 
     
  • les dépenses publicitaires nettes enregistrées au cours du dernier exercice comptable sont égales ou supérieures à 100 000 euros.

Le dispositif repose sur le principe de l’exposition publique. Faire un contrat climat est volontaire, mais la décision de l’entreprise et le contenu du contrat seront rendus publics. Les entreprises soumises à l’obligation de déclaration sur la plateforme qui ne souscriront pas à un contrat climat seront exposées publiquement par les pouvoirs publics.

Les contrats se divisent en deux parties : 

  • Une partie transversale « socle » qui concerne les engagements généraux de l’ensemble des signataires d’un contrat climat, quel que soit leur métier ou secteur d’activité ainsi que des engagements spécifiques à certaines organisations (ARPP, Union des marques, Filière Communication). 
     
  • Une partie sectorielle qui concerne les engagements propres aux différents secteurs d’activité et sont répartis selon 5 axes prédéfinis (dont un relatif à des engagements « autres », permettant à chaque organisation de valoriser ses propres engagements et indicateurs complémentaires).

Consulter le 1ᵉʳ bilan des contrats-climat par l'ARCOM

Réduire le volume de publicités relatives à des produits ou des services ayant un impact négatif sur l’environnement

Les produits et services mis en avant dans vos publicités sont-ils particulièrement polluants ou ont-ils fait l’objet d’une démarche de réduction de leurs impacts tout au long de leur cycle de vie ? Sont-ils porteurs d’un label environnemental reconnu ?

L’objectif étant d’orienter le choix des consommateurs vers les produits et services à plus faible impact et pour inciter les metteurs sur le marché à transformer leur offre. 

Dans cette logique, plusieurs régies ont développé de nouvelles offres publicitaires appelées ÉcoRespons’Ad chez TF1 Pub, Green Spirit chez France TV Publicité… Il s’agit d’écrans privilégiés conçus comme des repères pour le public, pour valoriser les produits à moindre impact sur l’environnement. 

Dans ce cadre, l’ADEME a développé un cahier des charges (régulièrement révisé), sur lequel s’appuient les régies publicitaires avec lesquelles elle est en partenariat, pour sélectionner les produits et services concernés.

Afin de suivre la proportion de messages publicitaires répondant aux exigences du cahier des charges de l'ADEME, cette dernière s'est associée à Kantar Media pour une veille RSE dédiée depuis 2022. 

Promouvoir des modes de vie et des comportements plus soutenables

Au-delà de la nature des biens et services promus, les publicités incarnent trop souvent des modes de vie souvent incompatibles avec la transition écologique. 

En tant que publicitaire vous pouvez contribuer à la représentation d’une nouvelle société de consommation respectueuse de l’environnement et de nouvelles normes éthiques. 

Consulter le guide "Représentations des modes de vie et transition écologique"

Mesurer et réduire les impacts lors de la production et la diffusion des pubs

Comme toute réalisation audiovisuelle ou print, la production d’un spot publicitaire ou d’une affiche génère un certain nombre d’impacts environnementaux et sociaux liés aux déplacements des équipes et du matériel, au tournage ou à l’impression, aux consommations énergétiques, à la postproduction…

En tant que publicitaire, il est de votre rôle de les identifier, dans une approche « cycle de vie », et de les réduire. 

Sensibiliser et former les équipes 

Les enjeux écologiques et RSE restent encore aujourd’hui généralement méconnus des acteurs de la filière publicité, bien qu’ils fassent partie des éléments clés d’avenir.

En tant que communicant, vous pouvez sensibiliser les décisionnaires de votre entreprise aux enjeux de la publicité responsable comme levier de transformation de leur propre entreprise et de la société en général. 

Les bilans "Publicité et Environnement" ADEME / ARPP

Pour aller plus loin


Dans cette rubrique

Guide de la communication responsable

Le guide de la communication responsable - nouvelle édition

Analyse des enjeux, conseils pratiques et avis d'experts : ce guide accompagne tous les professionnels de la communication et du marketing, du privé comme du public, sur la voie d'une transition écologique indispensable et désirable.

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